La collection de poche est un dispositif de diffusion de l'écrit à un public très large, à l'échelle mondiale, et un mode privilégié de constitution et de transmission du patrimoine littéraire et scientifique. Ce livre traite de l'histoire et du développement des collections de poche en Europe du XVIe siècle à nos jours. Essai d'histoire culturelle, il s'intéresse à la fois à la construction de la notion de collection éditoriale dans toutes ses dimensions et à une histoire des formats dits portatifs puis de poche, jusqu'à la question de leurs nouvelles déclinaisons à l'heure de la dématérialisation du livre. Pour expliquer le formidable succès des collections de poche dans l'édition contemporaine, il remonte à leurs origines - matérielles, intellectuelles, culturelles -, et suit l'évolution du rôle des formats réduits du livre dans l'édition. Il montre ainsi comment des éditeurs ont profondément transformés, grâce à leurs collections, le système de publication des livres - pratiques du dépôt chez les libraires, de l'office, de la rémunération des auteurs au pourcentage... -, et l'organisation de la production éditoriale par des opérations de rassemblement et de réorganisation des textes souvent guidées par l'idée d'une bibliothèque idéale.
«?Sous chaque mot chacun de nous met son sens ou du moins son image qui est souvent un contresens. Mais dans les beaux livres, tous les contresens qu'on fait sont beaux?», écrit Marcel Proust. Les multiples interprétations visuelles de son oeuvre illustrent sa définition du «?beau livre?», depuis les premières éditions illustrées d'À la recherche du temps perdu jusqu'à la bande dessinée de Stéphane Heuet.
Si Madeleine Lemaire, qui illustra Les Plaisirs et les Jours, publié en 1896, est relativement connue, le travail d'Hermine David reste largement ignoré, sans parler des pointes-sèches de Barbara Zazouline. Ce sont pourtant les frontispices d'Hermine David, réalisés entre 1929 et 1936, qui ont imposé le choix de scènes repeintes successivement par Kees Van Dongen, Philippe Jullian, Emilio Grau-Sala et Jacques Pecnard. Tous ces artistes se sont heurtés au paradoxe de devoir représenter «?un peu de temps à l'état pur?», qui était l'objectif de Proust.
Reprises et variations se sont succédé dans les éditions illustrées de la Recherche, depuis les in-textes dans celle d'Un amour de Swann de Pierre Laprade dans les années 1930, jusqu'à celle de Pierre Alechinsky, qui l'orne dans les marges, et de Yan Nascimbene, persuadé qu'«?il faut illustrer entre les lignes?».
Ce livre est un des tout premiers essais sur l'oeuvre de Christian Prigent, né en 1945, un des écrivains d'avant-garde majeurs de ce temps, fondateur de la revue TXT, dans la mouvance de Tel Quel, à la fois poète, romancier, essayiste, critique d'art et performeur. Les dix chapitres rassemblés ici présentent autant d'études d'oeuvres parmi les plus significatives de l'auteur, dans les domaines de la poésie et du roman.
Professeur émérite, Laurent Fourcaut s'est attaché à situer l'écrivain dans la littérature contemporaine, en héritier des auteurs dont il s'est réclamé : Lucrèce, Rabelais, Rimbaud, Jarry, Bataille, Ponge, Denis Roche... Il a également entrepris de définir une écriture puissante qui tire son énergie d'un rythme branché sur le corps et qui défait les formules et représentations enkystées dans la langue pour qu'émerge le plus de réel (biographique, social et politique) possible. L'ouvrage présente aussi une bibliographie complète, tant de l'oeuvre foisonnante de Prigent que de ce qui a été écrit à son sujet.
En dialogue avec la littérature occidentale depuis la Renaissance, la littérature polonaise fait à présent l'objet d'une reconnaissance internationale, confirmée par plusieurs prix Nobel dont le dernier a été accordé en 2019 à Olga Tokarczuk. Cet ouvrage porte un regard nouveau sur la période de l'occupation nazie et du régime communiste, qui suscitent encore des polémiques et des interprétations contradictoires.
Hélène Wlodarczyk interroge la littérature polonaise au prisme de la question de l'universalité, qui se pose aux hommes dans les périodes de résistance au totalitarisme. La littérature y est confrontée à une crise du langage qui conduit à l'absurde, remettant en cause par l'ironie et l'autodérision toute ve´rite´ a` peine formule´e. Elle met au jour dans les oeuvres des e´crivains polonais, habitants de « l'Autre Europe » issue du partage de Yalta, une attitude contemplative, une « voie passive », propre à l'évolution de la pensée occidentale face aux catastrophes de la civilisation et au renouveau de la pensée scientifique, en rupture avec le positivisme. Outre des auteurs déjà célèbres dans le monde, certains écrivains polonais importants sont présentés pratiquement pour la première fois au public francophone. Écrit en français, l'ouvrage privilégie la perspective de comparaison avec la littérature française.
Cet ouvrage s'adresse en premier lieu à tous les étudiants préparant les agrégations de Lettres et de Grammaire, mais aussi au lecteur curieux de recherches en stylistique. Se trouvent ici réunies les interventions de la traditionnelle journée d'agrégation, à l'initiative de l'UFR de langue française de la faculté des Lettres de Sorbonne Université, sur le programme de la session 2020 des épreuves de grammaire et stylistique françaises : Aspremont, Hippolyte de Robert Garnier, Les Caractères de La Bruyère, Zadig et L'Ingénu de Voltaire, Les Amours jaunes de Tristan Corbère, L'Homme foudroyé de Blaise Cendrars. En appuyant leurs analyses sur des aspects linguistiques, lexicales, génériques ou poétiques, les contributeurs de ce volume illustrent l'apport de la lecture stylistique à l'interprétation des textes.
Séries télévisées, grands héros populaires, littérature et cinéma de genre, franchises déclinées en romans, films et jeux vidéo..., la culture contemporaine obéit de plus en plus à des logiques sérielles. Or, concevoir une oeuvre littéraire s'inscrivant dans une série engage des modes de création spécifiques et suppose l'intervention de nouveaux acteurs. C'est cette genèse des productions littéraires sérielles que ce numéro se propose d'explorer à travers une série d'études portant sur des sujets aussi variés que l'écriture en collaboration (Dumas et ses « nègres »), les traductions sérielles (la « Série Noire »), le rôle de l'éditeur populaire dans la création (Fleuve Noir, Harlequin), les stratégies d'écriture des auteurs (Frédéric Dard, Gérard de Villiers, Michel Bussi, Nine Gorman), les techniques employés par les romanciers (Marcel Allain et ses rouleaux de cire), enfin les stratégies déployées par les industries culturelles autour des grandes marques transmédia (la franchise Harry Potter). À travers ces différents objets, c'est aussi une plongée dans la fabrique de la culture populaire qui est proposée.
En 1762, Carlo Goldoni quitte à jamais Venise pour Paris où la Comédie-Italienne met à sa disposition ses acteurs, son théâtre et son public. Sur cette "scène bâtarde", déconsidérée par les uns, investie par les ambitions créatives des autres, Goldoni réalise une hybridation nouvelle du savoir-faire dramaturgique français et de la tradition théâtrale italienne, sur fond constant de bilinguisme et d'équilibre - sans cesse remis en cause - entre voix et musique, entre parole et corps.
Comment légitimer l'art italien dans la capitale européenne du théâtre ? Comment réunir les masques séculaires et l'esprit des Lumières ? Comment renouveler la commedia dell'arte, intégrer dans le même espace et le même temps "réalisme" et féérie ? Quelle relation artistique s'établit entre la dramaturgie comique italienne et celle, française, de l'opéra-comique moderne ? Quelle réception réserveront les spectateurs parisiens au plus grand dramaturge italien du siècle ? Andrea Fabiano, à partir de l'analyse de canevas manuscrits, de sommaires de comédies, de documents d'archives et de comptes rendus parus dans les périodiques parisiens, donne une première lecture globale de la diversité théâtrale présentée par la Comédie-Italienne de Paris dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.
Une telle étude permet d'appréhender dans sa complexité le long parcours d'auteur ainsi que le processus d'expérimentation et de métissage que mène Carlo Goldoni, qui propose in fine une théâtralisation de son propre théâtre, une histoire de son cheminement unique et transfrontalier de dramaturge, d'explorateur des âmes et des fantasmes.
Essais et introductions permet d'appréhender la cohérence de l'oeuvre de Yeats.
L'Irlande est là : politique avec Parnell ; sociale avec les personnalités qu'il admire, mais aussi ces Irlandais dont il dénonce l'étroitesse d'esprit ; culturelle encore car il y puise son désir d'une poésie irlandaise de langue anglaise. Cette réalité est pétrie de mythes et de folklore, les fées ou les fantômes s'incorporent aux systèmes ésotériques. Chez les penseurs du XVIIIe siècle, Yeats découvre la même critique du matérialisme puis perçoit des analogies entre leur philosophie et les textes hindous.
Le védantisme, dont l'étude se confond en partie avec celle de la théosophie, de la Golden Dawn et la lecture d'A-P Sinnett, pénètre sa pensée. Il attire l'attention sur Un moine indien de Shri Purohit Swami ou La Montagne sacrée de Bhagwan Shri Hamsa. Il s'appuie sur ces textes pour rejeter le mysticisme chrétien, alors qu'il prône la satisfaction de tout l'être. La quête métaphysique sert ses fins esthétiques, car traditions gaélique, occulte, orientale, par leur rituel et leur symbolique, réhabilitent l'imagination, "moyen d'accéder à la vérité que n'a pas la raison".
Les grands noms qui jalonnent Essais et introductions sont Dante, Spenser, Shakespeare, Shelley, Balzac, Morris, Synge, Tagore ; les principaux courants artistiques, préraphaélisme, symbolisme, décadence ou la nouvelle poésie, que Yeats n'apprécie guère mais dont il reconnaît l'intensité ; tous les genres, outre la poésie, se retrouvent sous sa plume : le roman, le "théâtre d'art" proche de Wagner, qui, de Maeterlinck, le conduit à Craig et au nô.
Écrits au fil de l'existence du poète, ces Essais permettent de suivre le cheminement de sa quête ; à travers le jeu des correspondances, il tisse la trame entre visible et invisible. En exposant les sources multiples où l'a guidé son éclectisme, il dévoile l'alchimie qui précède la création, puis, au stade de l'écriture, l'importance des symboles traditionnels aux multiples significations, du rythme, de la relation mot-musique.
Pense-bête, essai de titres en cascade, série d'instructions, empilement de notes documentaires, inventaire de matériaux langagiers divers et variés... La liste stimule la création de multiples manières et sous diverses formes. Ses vertus expliquent la fréquence de son emploi dans les dossiers génétiques. Décrire la pratique de la liste, comprendre sa force créatrice, dégager son unité derrière la variété de ses formes et de ses fonctions : tels sont les objectifs que se donne ce numéro. Pour y parvenir, il réunit des spécialistes de la liste, de la genèse littéraire et de la textualité, que ce soit autour de Jules Verne, Paul Valéry, Georges Perec, James Joyce, Carlos Liscano, Pierre Senges ou Jean-Philippe Toussaint.
Ce numéro de Genesis accompagne le lecteur dans l'atelier des plus grands écrivains de la tradition italienne, présente leurs « paperasses » et questionne, à travers elles, les processus de la création et de l'interprétation littéraire. Sept siècles de littérature italienne sont passés au crible d'éminents spécialistes des manuscrits d'auteurs, qu'il s'agisse des brouillons du Chansonnier de Pétrarque, des « livres d'auteur » calligraphiés de Boccace, des différentes versions des Délits et des peines de Beccaria ou des Fiancés de Manzoni, des manuscrits préparatoires du Roland Furieux de l'Arioste et des livres annotés du Tasse et d'Alfieri. Plus contemporains, Gramsci avec son « labyrinthe de papier », Elsa Morante, Antonio Tabucchi et Erri de Luca complètent le tableau et perpétuent la tradition.
Ce livre « raconte » l'esprit de 1922.
Cet ouvrage collectif vise à saisir l'air du temps qui règne en 1922 sur la scène anglo-américaine littéraire et artistique. Certaines publications et productions culturelles de cette année sont considérées aujourd'hui comme fondatrices de l'époque moderniste (à commencer par Ulysses de Joyce et The Waste Land de T.S. Eliot).
À travers des événements, des publications, des correspondances, l'avènement d'un auteur ou d'une autrice, des réussites ou des échecs, des querelles ou des enthousiasmes, il s'agit de saisir les espérances et les désillusions d'une époque, d'une année qui a fait époque et qui se dit à travers des publications devenues emblématiques et d'autres dites « mineures ». Une époque qui s'entend par ses sons produits en 1922, et se saisit aussi par ses images.
En somme, cet ouvrage met en exergue ce « moment 1922 » à travers une constellation d'instants, de mots, de formes esthétiques, de bruits qui ensemble viennent éclairer ce fameux Zeitgeist d'après-guerre, ce point de basculement ou de retournement.
Le dossier principal présente aide à mieux comprendre les multiples fonctions de la réflexion de Voltaire sur l'histoire littéraire et sur le rôle politique et social de la littérature à travers les siècles. À la fois historien, critique, théoricien et praticien de la littérature, Voltaire s'est employé à inventorier, classer, caractériser, critiquer les productions littéraires du passé, sources d'innombrables écrits. Sa réflexion esthétique et sa création même se nourrissent de cette fréquentation des auteurs du passé. Si certaines des positions que Voltaire développe ressortissent d'une pensée hiérarchisée et souvent polémique, de la littérature, il fait aussi preuve d'une roborative modernité, ouvrant sa réflexion aux littératures contemporaines, féminines et étrangères.
Un second ensemble de contributions vient compléter les dossiers publiés dans les deux livraisons précédentes : sont ainsi rassemblées, dans une série intitulée « Lectures de l'Est », cinq contributions qui étudient la réception de Voltaire grâce à l'histoire du livre et des bibliothèques, fournissant des éclairages sur les pratiques de collectionneurs moraves, des premiers traducteurs grecs de Voltaire, des libraires autrichiens, de lecteurs voyageurs entre la Suisse, la Pologne et l'Allemagne et de ses lecteurs, libraires et traducteurs russes.
« La véritable philosophie des Amants est celle de Platon », écrit Jean-Jacques Rousseau dans une note de Julie ou La Nouvelle Héloïse. Au-delà de ce platonisme à vrai dire très singulier, l'hypothèse centrale de ce livre est que cette « philosophie des amants », qui porte Julie et Saint-Preux, puis toute la communauté de Clarens, à (se) créer un monde imaginaire et parallèle à ce monde ci, est aussi le ressort poétique et philosophique le plus essentiel du plus grand roman français du XVIIIe siècle. Avec cette « philosophie des amants », il y va, en effet, de l'oeuvre toute entière : depuis les images enchanteresses qui auraient saisi Rousseau et fait de lui un romancier malgré lui, jusqu'à la préparation méticuleuse des estampes destinées à orner la première édition, en passant par la fonction déterminante des « opiniâtres images » mentales qui, tout au long du texte, obsèdent les amants, tout invite à faire de la puissance de l'imagination et de la chimère un principe essentiel de Julie ou La Nouvelle Héloïse.
Cet ouvrage s'adresse en premier lieu à tous les étudiants préparant les agrégations de Lettres et de Grammaire, mais aussi au lecteur curieux de recherches en stylistique. Se trouvent ici réunies les interventions de la traditionnelle journée d'agrégation, à l'initiative de l'UFR de langue française de la faculté des Lettres de Sorbonne Université, sur le programme de la session 2021 des épreuves de grammaire et stylistique françaises : le Testament de François Villon, L'Heptaméron de Marguerite de Navarre, les Satires de Nicolas Boileau, l'Histoire de ma vie de Giacomo Casanova, Mauprat de George Sand, Le Balcon de Jean Genet. En appuyant leurs analyses sur des aspects linguistiques, lexicales, génériques ou poétiques, les contributeurs de ce volume illustrent l'apport de la lecture stylistique à l'interprétation des textes.
Au début du siècle, naît en espagne le projet de " l'hispanité ", qui aspire à la création d'un empire culturel hispanique, se substituant aux colonies perdues.
Dès lors, il constitue l'un des axes principaux de la politique étrangère du pays, et ce jusqu'à la fin de la période franquiste. dans son sillage, émerge peu à peu un courant tourné vers les sépharades, ces descendants des juifs expulsés de la péninsule ibérique en 1492 vivant principalement dans les balkans, et en partie au maroc. il s'agissait pour les " séphardistes " de rapprocher l'espagne et ses " enfants perdus ".
Encore fallait-il agir sur la représentation que les espagnols avaient des juifs et réhabiliter séfarad, la terre d'espagne, dans la mémoire judéo-espagnole. le processus atteint sa pleine maturité au cours de la quinzaine d'années précédant la guerre civile (1936-1939). à sa dimension culturelle et humaniste, s'ajoutent les bénéfices matériels que le pays envisageait de retirer d'un tel rapprochement.
Malgré quelques acquis remarquables, le séphardisme se heurte à un certain nombre d'obstacles. non seulement les circonstances politico-économiques lui étaient défavorables, mais il restait aussi cette défiance des sépharades envers le pays qui les avait rejetés quatre siècles plus tôt. sans oublier dans le même temps, que l'antisémitisme se répandait en europe et que le sionisme paraissait à ces populations comme une alternative face aux turbulences du moment.
Ce livre passionnant nous plonge non seulement dans cette utopie qu'a été le séphardisme, mais il ouvre aussi une fenêtre inédite sur l'expérience de ces exilés de la péninsule, qui pendant des siècles ont perpétué la langue et la culture espagnoles dans leurs lieux d'exil, tout en cultivant le rejet de l'espagne, qui les avait trahis.
Miron Bialoszewski, auteur de recueils de poésies de miniatures narratives et de longs textes en prose ainsi que créateur théâtral représente un paradoxe : novateur hermétique, voué exclusivement à la création, il reste néanmoins l'écrivain le plus authentiquement lié à la vérité quotidienne de la Pologne pendant quelques décennies du 20e siècle qui abondèrent en crises et tournants historiques, politiques et culturels. La problématique scientifique que son ¦uvre fait découvrir va des questions concernant l'écriture, à travers celles concernant les structures génériques (le principe autobiographique étendu à l'ensemble de l'¦uvre) jusqu'aux sujets (tels que la place de l'écrivain dans la cité ou témoignage en tant que vocation première de la littérature).