Gilles Savary propose une grande loi des mobilités de proximité et en esquisse le contenu (mise en ordre de la décentralisation, gouvernance locale, financement des transports).
Eros et libido, sexe et genre : Les mots se succèdent depuis un peu plus d'un siècle pour dire la dualité et le rapport entre hommes et femmes.
Si l'on cherche l'objet philosophique, on trouve l'expression " différence des sexes ", " Geschlechterdifferenz " sous la plume hegelienne. Quant au genre, ce mot fait le pari de brouiller les pistes des représentations contraintes qui assignent chaque sexe à sa place. Et si, toute terminologie confondue, on s'en tenait à ce que la " différence des sexes " est une catégorie vide ? Alors, on se situerait " à côté du genre ", à côté des affaires de définition et d'identité, pour établir le repérage des lieux où sont pensés les sexes, dans leur tension, leur décalage, leur disparité au regard du contemporain démocratique.
Au fond, la démarche est inversée : il ne s'agit pas de voir ce qu'il en est du sexe et du genre, mais de dire ce qui surgit dans la pensée quand égalité et liberté révèlent des enjeux sexués dans la politique et la création, l'économique et le corps, la pensée et l'agir.
Les jeunes adultes et les quadragénaires des « quartiers » éprouvent un fort sentiment d'injustice à l'encontre des institutions et du politique. Les mobilisations des adolescents et des jeunes adultes des cités populaires, bien souvent, se concrétisent par des révoltes urbaines, par des formes d'« incivilités » ou de provocations à l'encontre des agents des institutions locales, par des esquives face à la police ou « les fuites en avant » devant les structures où l'on doit rendre des comptes ou encore par des différentes configurations de « radicalisations » (religieuses, anti-institutionnelles, « complotismes », délinquances violentes et/ou crapuleuses, etc.) sans oublier enfin des formes multiples de dépressions (repli sur soi, évitement du monde du travail, etc.).
Ce récit est celui d'une femme qui a connu dans son enfance la loi d'un père brutal, seul maître à bord dans l'espace familial. Au moment où elle termine son analyse, elle porte un regard rétrospectif sur son enfance, sur la violence telle qu'elle peut être perçue par un enfant, sur les traces qu'elle laisse et comment la psychanalyse peut permettre de se dégager des effets d'une violence domestique sournoise, invisible et certainement plus ordinaire qu'on l'imagine.
Et si l'extrême-droite était en chacun de nousâ??? Déjà-làâ??? Informant nombre de nos goûts et de nos dégoûtsâ??? Telle est l'hypothèse que fait Michel Latour, de gauche depuis toujours. Par sa lucidité sur ses propres troubles et par sa franchise sur ses doutes concernant le monde nouveau qui s'annonce, il nous tend un miroir. Et invite à ne pas s'en tenir à l'indignation morale. En pointant nos démissions, il dessine la possibilité d'un autre engagement politique. Pour déjouer ce qui s'annonceâ??: une prochaine et inévitable étrange défaite.
L'exil forcé de plusieurs millions de Syriens, qui ont fui les zones de combats et les répressions des différentes factions impliquées dans la guerre, a mis à l'épreuve le droit international des réfugiés dans son application concrète.
La plupart des pays ont réactivé les frontières comme opposition à l'accueil de ces « indésirables », et certains ont même criminalisé la condition de réfugié en la qualifiant « d'invasion massive de migrants » clandestins pendant que d'autres, se pensant plus « modérés », préféraient parler de « crise des migrants », faisant fi eux aussi du statut de réfugié, des conventions et autres traités internationaux qui garantissent la protection à ceux dont la vie est menacée.
Les pays européens ont fait le choix de sous-traiter l'accueil de ces exilés et le contrôle de leur mobilité aux pays voisins de la Syrie, le Liban, la Jordanie et la Turquie donnant naissance à une nouvelle géopolitique migratoire dont l'instrumentalisation dans les rapports de force internationaux s'est confirmée dans les contentieux entre l'Europe et la Turquie, l'Europe et la Biélorussie ou encore entre l'Espagne et le Maroc.
L'ouvrage de l'historien américain Philip Nord, After the Deportation. Memory battles in Postwar France, publié en 2020 à Cambridge University, éclaire d'un jour nouveau l'histoire de la commémoration de la déportation en France, de 1945 à nos jours. Tout d'abord sur le fond : l'auteur, spécialiste de l'histoire politique et culturelle française du XX siècle, révise la lecture dominante qui a été faite de l'histoire de cette mémoire, en vertu de laquelle les Français ont imaginé les déportés comme des victimes antifascistes et patriotiques du régime nazi jusque dans les années 1960 et 1970, lorsqu'une jeune génération a remis en question la complicité française dans l'Holocauste, ainsi que le racisme et le colonialisme français. En conceptualisant la mémoire de la déportation comme un récit polyphonique aux motifs changeants et multiples, où la voix des juifs n'était ni absente ni inaudible, et ce dès l'immédiat après-guerre, il reformule la lecture historiographique dominante d'une libération soudaine de la parole des juifs déportés et des représentations de l'Holocauste (silence-to-voice narration) non pas en demandant pourquoi la mémoire de la déportation juive a été refoulée jusqu'en 1968,mais pourquoi la génération de 1968 a cru découvrir des voix qui étaient en fait là depuis toujours.
Ce livre propose les résultats d'une enquête sociologique sur un moment clef de l'histoire de l'Europe occidentale (ce que Jacques Le Goff désignait comme le « long treizième siècle »). Ce moment est celui où se sont élaborées et affirmées les « valeurs » ou les « catégories de pensée » -- l'individu, l'art, l'amour, l'État, le marché (et donc le capitalisme), etc.
-- qui fondent ce qu'on désigne du terme de modernité.
Nous sommes donc toujours modernes, c'est-à-dire que nous fonctionnons, pensons, etc. toujours sur ces catégories qui, certes, ont connu des évolutions, des réélaborations, etc. mais restent le socle intellectuel de notre temps.
On a souvent confronté la tradition critique issue de l'École de Francfort (incarnée notamment par Habermas) et la pensée critique de Foucault, autour de la problématique de la modernité et de la rationalité. Ce volume prend un autre chemin pour proposer des croisements entre les « pensées critiques ». Il met en dialogue l'École de Francfort, entendue dans la pluralité de ses courants, depuis le projet d'Adorno et Horkheimer jusqu'à son renouvellement par Habermas et Honneth, avec d'autres pensées qui ont émergé en France, issue de Foucault et d'Althusser, du poststructuralisme et de la déconstruction, mais aussi des penseurs défendant un « retour au politique » (Lefort, Castoriadis et Rancière). Il rend compte de la recherche en train de se faire sur la pensée critique, par des chercheuses et chercheurs de renoms (Oliver Marchart, Harmut Rosa, Axel Honneth, Daniel Loick et Eva von Redecker) mais aussi par de jeunes chercheurs développant des problématiques nouvelles.
L'ouvrage analyse les ambivalences de la gestion étatique du fait musulman et l'extension d'une espèce d'idéologie du soupçon. Celle-ci est portée par des acteurs étatiques, acteurs associatifs et quelques chercheurs, non forcément coordonnés entre eux, à l'égard de certaines manifestations du fait musulman jugées douteuses, au regard d'une certaine conception moralisatrice et autoritariste de la République et de la laïcité.
Le Recueil Auschwitz a été écrit durant les derniers jours de fonctionnement d'Auschwitz par Abraham Levite et un groupe de déportés juifs. Ce texte inédit présente le projet d'une véritable anthologie des témoignages écrits dans le camp. Il constitue en cela une résistance radicale à la déshumanisation du système concentrationnaire. Cette archive, traduite par les deux plus grandes traductrices françaises du yiddish, Batia Baum et Rachel Ertel, est accompagnée de huit commentaires qui savent mettre en évidence la subtilité de ce projet et sa dimension littéraire, tout en s'adressant à un public de non spécialistes.
Qu'il s'agisse de consentements affectifs et sexuels, de consentements me´dicaux sous leurs diffe´rents aspects (aux soins qui nous sont propose´s, que nous subissons et auxquels nous devons nous soumettre), de divers consentements juridiques et commerciaux, ou de toutes autres natures, la question du consentement s'e´rige en question majeure pour les sciences humaines. Elle e´merge sur fond d'une crise des accords tacites intrasociaux, intrafamiliaux et plus ge´ne´ralement des rapports interpersonnels, lie´e aux remaniements identitaires de l'espace commun.
Cet ouvrage permet de mettre au jour cette dimension majeure des accords tacites alors que le consentement est essentiellement envisagé du point de vue de l'importance contractuelle et positive qu'encourage le droit. Le modèle en est le « consentement libre et éclairé ».
En montrant qu'il y a un travail du consentement, que le consentement est un processus et pas seulement un contrat, et en le démontrant à partir d'exemples précis, cet ouvrage veut contribuer à une attention fine au « travail du consentement » pour l'accompagner, le soutenir dans le soin médical, familial mais aussi social, en vue d'une conception émancipatrice et libre des relations et du monde humain.
Comment et en quoi les études sur le genre permettent de retravailler les disciplines scientifiques ? Comment la prévalence de l'androcentrisme des sciences crée des apories au sein des connaissances scientifiques ? En quoi le prisme du genre peut-il requestionner les pratiques scientifiques, particulièrement au sein des sciences dites « dures » et expérimentales ? En quoi le genre permet aussi de renouveler l'appréhension des pratiques militantes et professionnelles ? Cet ouvrage s'intéresse aux apports du genre, un concept issu des sciences humaines et sociales qui tend à s'appliquer à la réflexion scientifique menée au sein d'autres mondes de la recherche. Cette inclusion permet de pointer les écueils, dans des domaines scientifiques longtemps restés hermétiques aux enjeux du genre. Il rend compte de travaux récents questionnant les enjeux épistémologiques de la critique féministe des sciences, mais aussi portant sur les questions d'identité de genre ainsi que de santé et de contrôle de la sexualité.
Cet ouvrage revient en détails et avec des illustrations et des data précises sur les dernières élections législatives, les repositionnant dans l'histoire électorale récente afin d'en dégager quelques pistes de compréhension et quelques éléments pour mieux envisager ce que pourraient être les fondements de possibles restructurations de la vie politique française dans les années à venir.
L'école française est devenue le bastion des élites françaises. Comment en sommes-nous arrivés là ?
Dans cet ouvrage incisif et renseigné, Jean-Paul Delahaye met au jour une situation masquée par les pseudo-discours républicains.
Si l'école française répond aux attentes de la plupart des élèves, elle ne parvient pas à faire réussir trente pour cent d'entre eux... L'école française est profondément inégalitaire.
Cette situation n'est pas le fait des enseignants, qui pour beaucoup d'entre eux sont au front, quotidiennement, se battant avec les moyens dont ils disposent.
Mais les choix politiques et budgétaires qui sont ceux des élites, quelle que soit leur couleur politique, maintiennent cette situation déplorable qui fait de la France le pays où les origines sociales ont le plus d'impact sur les destins scolaires.
Contrairement aux idées reçues, l'école française fait financer les études des plus riches, des études plus longues, plus coûteuses, par l'argent des pauvres. C'est le ruissellement à l'envers. Le pognon de dingue est d'abord dirigé vers les enfants des classes les plus aisées.
Cet ouvrage dévoile, arguments à l'appui, un scandale d'État.
Dans ce livre riche d'informations et de faits souvent ignorés, Jean-Paul Delahaye, un des meilleurs connaisseurs de l'école française où il a occupé toutes les fonctions sur près d'un demi-siècle, dresse un état des lieux sans complaisance de cette préférence française pour les inégalités.
Mais il trace aussi, de façon plus positive, les contours de ce que pourrait être une école républicaine et fraternelle vraiment fidèle à ses valeurs.
« Livre qui a paru sous le règne d'Elsa, mais qui a commencé avant », La Grande Gaîté donne à lire, selon Aragon, « les poèmes qui sont les plus purement d'ordre émotionnel qu'[il] ai[t] jamais écrits ». C'est que la composition de ce recueil méconnu, publié en 1929, d'une âpreté et d'une virulence sans égales dans l'oeuvre d'Aragon, est le témoin direct d'une grave crise amoureuse qui faillit emporter son auteur à Venise en 1928.
Après un ensemble de poèmes où Aragon tire à boulets rouges contre le monde des « anciens combattants » et des « flaireurs de bidet » de l'entre-deux-guerres, la « contre-poésie » de La Grande Gaîté investit la grande lyrique amoureuse, dont, par son titre même, « Poème à crier dans les ruines » se réapproprie la tradition, en prenant les accents du désespoir le plus cru. « Tous deux crachons tous deux / Sur ce que nous avons aimé tous deux » : c'est par ces vers blasphématoires qu'il débute, se livrant à des expérimentations d'une grande originalité.
Comprendre les modulations de ce ton si particulier de l'amour en ruine, en pénétrer les beautés violentes et les paradoxes : telle est l'ambition de cet ouvrage, qui voudrait aussi montrer à l'oeuvre un autre Aragon.
Le livre déconstruit la notion de « cause animale » telle qu'elle est présentée dans les médias de façon quasi consensuelle et met en évidence sa dynamique historique au service du capitalisme.
Pour le bien des animaux, de la planète et de notre santé, il faudrait renoncer à l'alimentation carnée voire à tous les produits animaux et consentir à une agriculture sans élevage.
Le livre fait le point sur les débats et interroge le projet abolitionniste d'un point de vue politique et du point de vue de nos relations aux animaux.
Pourquoi maintenant ? Pourquoi cette défense consensuelle de la cause animale et la condamnation des systèmes industriels, alors que ceux-ci existent depuis plus de cinquante ans ?
L'agriculture sans élevage que défendent les abolitionnistes est-elle souhaitable ? Possible ? À qui profi terait- elle ? Est-il possible de « libérer » les animaux, notamment du travail, et de pérenniser nos relations avec eux comme le soutiennent certains théoriciens ?
Le livre montre que la « cause animale » participe de l'exclusion des animaux domestiques du monde social, via la mise en place d'une agriculture sans élevage.
L'ouvrage porte une critique des associations abolitionnistes de défense des animaux et décrypte leur mission d'agence de communication au service des nouveaux acteurs de l'alimentation que sont les startup de l'agriculture cellulaire soutenues par les multinationales et par les fonds d'investissement les plus puissants. Celles-ci affi chent leur volonté de prendre la place du modèle industriel qu'elles jugent obsolète et prétendent produire des aliments sains, durables...
Sans animaux.
La « cause animale » est de fait celle des actionnaires des biotechnologies, des grandes cultures et des industriels de la robotique. Le livre conclut sur le constat que la seule alternative à la violence industrielle contre les animaux est l'élevage et que la « cause animale », c'est la nôtre, celle de la sortie du capitalisme.
Lionel Jospin nous propose une relecture de son histoire personnelle au Parti socialiste, de son expérience du pouvoir... d'abord comme Premier secrétaire du Parti socialiste (1981-1988 ; 1995-1997), puis comme ministre de François Mitterrand (1988-1992) et enfin comme Premier ministre (1995-2002).
Ouvrage de mémoire et de projection, il apparaît au fil des pages que la conquête du pouvoir, et a fortiori son exercice, ne peuvent être que le fruit d'une intense construction militante. Revenant avec une tranquille lucidité sur le bilan des gouvernements socialistes de la fin du siècle, ceux de la présidence Mitterrand comme le sien, Lionel Jospin revendique les succès, y compris lorsqu'ils sont toujours débattus comme l'instauration du quinquennat, et assume les erreurs politiques sans voiler les faux pas moraux.
À la fin, de cette fin qui pourrait être un commencement, se révèle une certitude : à défaut de «?la?» vie, nombreuses furent «?les?» vies changées pour le meilleur, rançon pas si déshonorante de l'espérance. Lionel Jospin nous invite à penser cette idée neuve en actions redevenue la matrice d'un monde où l'égalité sera le socle des solutions pour construire, pour toutes et tous, une vie décente.
Quelles sont les origines du lien entre la monnaie et le pouvoir de l'État ? Comment celui-ci est-il susceptible, néanmoins, d'insuffler des principes démocratiques dans l'économie de marché ? Quelles perspectives, enfin, se dessinent pour penser la monnaie face aux enjeux sociaux et environnementaux du futur ?
Ce n'est pas assez de dire que le néolibéralisme a une histoire : il est une histoire. Ce livre en est la fresque. Serge Audier reconstitue les ramifications et les évolutions du néolibéralisme à travers la postérité du Colloque Lippmann et les tribulations de la Société du Mont-Pèlerin, en combinant histoire et conceptualisation.