En matière de littérature et de style, dit-on, les conservateurs révolutionnent et les révolutionnaires conservent. Les amis du peuple parlent le français de Richelieu, les amis de l'ordre jargonnent comme des Apaches. L'idée a la peau dure : remontant au moins à Stendhal, il n'est pas rare de la trouver sous la plume des réactionnaires d'aujourd'hui, chez Houellebecq, par exemple, qui fait dire à l'un de ses personnages que tous les grands stylistes sont des réactionnaires. La droite ferait passer le style avant toute chose. À preuve, Céline, dont il serait dès lors possible d'ignorer les idées antisémites et exterminatrices, ou du moins de les dissocier radicalement du style constitutif de sa grandeur.
Or, Vincent Berthelier le montre, ce discours remplit historiquement une fonction politique. Il se solidifie après- guerre, chez des Hussards soucieux de minimiser l'engagement vichyste ou hitlérien de la droite littéraire et de réhabiliter leurs aînés en les présentant comme des stylistes.
Plus largement, en étudiant un large corpus d'auteurs de droite et d'extrême droite, ce livre ambitieux voudrait repenser les rapports entre style, langue et politique. Il s'intéresse d'abord à la conception du style et de la langue défendue par certains écrivains, tout en proposant des analyses précises de leur écriture. À chaque étape, il s'agit d'explorer la problématique du style à partir des enjeux idéologiques du moment : dans l'entre-deux-guerres (Maurras, les puristes, Bernanos, Jouhandeau), dans la période de l'essor du fascisme et de la Libération (Aymé, Morand, Chardonne), enfin des années 1970 à nos jours, dans la période où s'élabore une nouvelle pensée réactionnaire (Cioran, Millet, Camus, Houellebecq).
Que désigne le réalisme ou plutôt les réalismes en littérature ? Appliqué à un moment précis de l'histoire littéraire ou à une intention générale de représentation fidèle de la réalité, le réalisme apparaît depuis le dix-neuvième siècle comme une notion aussi intuitive que complexe.
Les articles de ce volume reviennent ainsi sur les différentes théories du réalisme en littérature, du réalisme socialiste à la théorie anglo-saxonne de la littérature-monde, en passant par l'école de Francfort et la sociocritique. Interroger ces différentes approches du réalisme, c'est réaffirmer la justesse de ce concept tout en justifiant une approche résolument matérialiste : il s'avère en effet impossible de conceptualiser de façon opérante le réalisme sans conjointement prendre en compte un monde social à partir duquel la littérature est écrite et pensée.
L'ouvrage se propose de tenter de cerner ses usages non pas dans toutes ses réalisations médiatiques mais dans le domaine littéraire: que désigne le réalisme ou plutôt les réalismes en littérature ?...